Si nous devons croire le communiqué du 3 janvier dernier de la présidence française, coordonnant les cinq états membres permanents du Conseil de Sécurité de l’ONU, dont l’état français reste désormais le seul représentant au sein de l’Union Européenne du fait du Brexit : « Une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée ».
Belle résolution que voilà ! Mais qui aurait certes gagné à n’être point assortie de considérations non-contraignantes pour eux-mêmes, affirmant que : « tant qu’elles existent (ces armes nucléaires -, ndlr) elles doivent servir à des fins défensives, de dissuasion et de prévention de la guerre. »
Dans l’instant, cette assertion, parfaitement oiseuse, ne vise qu’à cacher l’impuissance diplomatique de ces Cinq Membres du vrai « Conseil de l’Insécurité Nucléaire », ne parvenant pas à faire adhérer au Traité de Non Prolifération – TNP – trois autres puissances nucléarisées grâce à eux-mêmes d’ailleurs – Inde, Pakistan et Israel –, ne parvenant pas à y faire revenir la Corée du Nord et ne parvenant pas à résoudre la question du nucléaire iranien …
Mais alors ? que viennent-ils donc faire à Brest, la semaine prochaine – près de l’Ile Longue et de ses stratégiques Sous-marins Nucléaires Lanceurs d’Engins -SNLE- –, tous ces 27 Ministres de la « Défense » de l’Union Européenne et leurs homologues des « Affaires Etrangères » ?
Nous pourrions naïvement croire qu’ils sont là pour signer et ratifier le TIAN – Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires –, qui a désormais force de loi internationale, contraignante mais seulement pour ses Parties, depuis le 22 janvier 2021.
En fait, comme 24 d’entre eux ne sont pas “vaccinés anti-nucléaire ni civil ni militaire” – Macron ne l’est particulièrement pas !, il est peu probable que les 3 seuls Etats Membres de l’UE ayant adhéré et ratifié le Traité TIAN ne parviennent à emporter l’adhésion des 24 autres à ce Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires. Seuls en effet l’Autriche, l’Irlande et Malte sur les 27, l’ont fait à ce jour.
Face à ce « en même temps » de dénonciation mais aussi d’acceptation de l’inacceptable, et donc d’immobilisme diplomatique, que pouvons-nous ou que devons-nous faire ?
Au cours de son Conseil d’administration du 26 novembre 2020, et sur la base du dossier rédigé par l’Observatoire de l’Armement (« Sous le sable, la radioactivité »: http://www.obsarm.org/spip.php?article341) la 4ACG – L’association des Anciens Appelés en Algérie et leurs Ami-es Contre la Guerre – s’est déclarée très préoccupée par les conséquences passées, actuelles et futures des 17 essais nucléaires réalisés par la France au Sahara de 1960 à 1966, et par le déni français actuel les concernant.
Quel a été l’impact de ces essais à répétition sur les populations et leur environnement ?
Quelle participation et quelles retombées radioactives et maladies radio-induites, pour les appelés et militaires d’active sur place – https://aven.org/ – et surtout, pour les populations sahariennes qui, n’en déplaise à Jules MOCH, y vivaient alors et ont continué d’y « vivre » et y sont mortes irradiées ou contaminées ?
Que sont devenus les déchets issus des essais nucléaires français en Algérie ? tous les matériels radioactifs utilisés ayant été enterrés sous le sable…
Quels ont été les coûts d’une telle guerre coloniale si l’on y inclut le coût de ces essais nucléaires ? La Cour des Comptes peut-elle s’y intéresser ? Nous donner un ordre de grandeur, du désastre financier civil et militaire ? A combien s’estime la connerie au nombre de grains de sable /kg ?
62 ans sont bientôt passés depuis le premier essai nucléaire en Algérie, le 13 février 1960.
La France persiste aujourd’hui dans son refus de livrer à l’Algérie les cartes topographiques révélant la localisation de ses restes et déchets nucléaires… enfouis sous le sable du Sahara !
Alors que nous sommes à bientôt 2 mois de la commémoration, le 19 mars 2022, des 60 ans des Accords d’Evian, mettant un terme à 8 années de guerre coloniale en Algérie, ne devons-nous pas exiger instamment, outre la mise en œuvre des préconisations du rapport de Benjamin Stora :
1- la fourniture immédiate par l’état français de ces cartes topographiques à l’état algérien à des fins de protection des populations toujours exposées aux radiations issues de ces 17 essais,
2- la fourniture immédiate d’assistance par l’état français à l’état algérien pour l’ouverture de chantiers de décontamination ou de sanctuarisation pour les zones qu’il vaut mieux ne pas toucher –a -, comme les articles 6 et 7 du Traité d’Interdiction des Armes Nucléaire – TIAN -, le prévoient.
– a – à des fins de non-relargage aérien ou hydraulique de radionucléides, il vaut mieux parfois sanctuariser que démanteler, comme à la centrale nucléaire de Brennilis en Menez Are in Bzh!
Les sables ocres et jaunes des dunes sahariennes vivent leurs vie de sables radioactifs emportés par les vents depuis 62ans et se rappellent parfois à notre bon souvenir jusque dans le Jura !https://www.acro.eu.org/nuage-de-sable-du-sahara-une-pollution-radioactive-qui-revient-comme-un-boomerang/ Chacun sait qu’officiellement, ils n’avaient pas plus de pass sanitaire ou vaccinal que ceux de Tchernobyl pour franchir la ligne Maginot ! Retour à l’envoyeur donc !
Le 9 mars 2021, poursuivant sa politique de « petits pas », l’Elysée avait annoncé que le chef de l’Etat avait « pris la décision de permettre aux services d’archives de procéder aux déclassifications des documents couverts par le secret de la défense nationale (…) jusqu’aux dossiers de l’année 1970 incluse ». « Cette décision sera de nature à écourter sensiblement les délais d’attente liés à la procédure de déclassification, s’agissant notamment des documents relatifs à la guerre d’Algérie », selon le texte.
Nous attendons donc cette déclassification des cartes militaires françaises topo nucléaires algériennes sous 2 mois !
Si la prochaine Assemblée Générale le la 4 ACG, prévue à Vichy, les 11, 12 et 13 mars 2022 prochains, statuera sur la réponse de l’exécutif français à cette injonction, nous invitons, en l’attente, toutes les filles et tous les fils d’anciens appelés en Algérie, leurs petits-fils et leur petites-filles, à nous rejoindre pour « Témoigner, transmettre, résister » et agir, car avec le nucléaire, qui ne se sent pas, qui ne se voit pas, nous sommes hélas sur un temps bien plus long que le nôtre !
Le 08/01/2022 à Brest
Jil Quillevere fils d’appelé en Algérie, objecteur politique OP 20, pour la 4ACG